LES ELECTIONS ONT ETE UNE FARCE JAMAIS VUE DANS L'HISTOIRE D'UN PAYS

 

L'opposition a réuni un pourcentage de 80% des voix exprimées, mais trois jours après, ce pourcentage fut approprié par les communistes et rendu publique dans cette variante mensongère. Une falsification jamais vue jusqu'alors.

Les protestations adressées auprès des pays du Mon­de libre restèrent sans suite.

Le 23 octobre 1946, Hector Mac Neil, secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères du gouvernement britan­nique, déclara: «La Roumanie est actuellement soumi­se à un régime de terreur de la part des milices gouvernementales et l'opposition ne jouit d'aucune liberté es­sentielle, libertés habituelles dans un Etat démocrati­que».

En même temps, le gouvernement des Etats-Unis protestait énergiquement contre «les obstacles et la vio­lente obstruction déployés par le gouvernement Groza contre l'opposition en Roumanie».

Voilà ce que Ruben Markham, correspondant de pres­se en Roumanie, écrit sur ces élections:

«En de nombreuses régions, les délégués et les ob­servateurs des partis d'opposition furent arrêtés avant le jour du vote. Ceux qui avaient pu conserver leur liber­té se virent interdire l'accès aux urnes... En de nombreux endroits, les urnes étaient pleines de bulletins et scellées avant que les premiers électeurs se soient présentés. Les fonctionnaires et les personnes employées par le gouverne ment votèrent plusieurs fois... Et pourtant, toute cette mise en scène ne suffit pas à donner la victoire au gou­vernement... Les commissions électorales locales eurent alors deux jours pour «inventer» les résultats... d'autres manipulations furent effectuées à Bucarest même. Les résultats des élections qui avaient été annoncés furent démentis et les faux totaux furent modifiés dans le sens où le souhaitait le Kremlin. Le gouvernement eut besoin de trois jours pour falsifier tous les chiffres et inventer des résultats qui furent finalement annoncés.»

 

APRES LES ELECTIONS

                                                                    Un journaliste américain parle

Bucarest, 25 novembre

La Grande-Bretagne et les Etats-Unis se trouvent à présent devant quelques alternatives désagréables en Roumanie, qui après les «élections» de mardi est liée indiscutablement à la Russie.

Aucune des deux puissances occidentales ne peut accepter les conditions et les résultats des élections sans faire l'aveu d'un parfait cynisme, qui a influencé la poli­tique russe dans les Balkans. Une méprise pour toute vé­ritable liberté des électeurs, des troupes de choc organi­sées qui firent la loi dans les rues de la capitale même, l'insouciance avec laquelle furent reçues les protestations des Anglais et des Américains, placèrent les Anglo-Améri­cains dans une situation beaucoup plus paradoxale que dans tout autre pays contrôlé par les Soviétiques.

De la brioche pour les Russes

Londres a annoncé qu'elle pourrait rompre les rela­tions diplomatiques. Ce ne serait qu'une brioche offerte à la Russie qui ne désire rien moins que ces deux obsta­cles soient éloignés de la Roumanie. Les effets du traité de paix seraient freinés et détruiraient les faibles espoirs de ceux qui voudraient voir se constituer en Roumanie des institutions démocratiques, avec l'appui de la pré­sence des Alliés.

D'un autre côté, la Grande-Bretagne et les Etats-Unis ne peuvent pas reconnaître ce gouvernement sans ren­verser de fond en comble leur politique. Selon l'opinion du correspondant, la reconnaissance du gouvernement signifierait l'acceptation d'un régime minoritaire le plus acharné survenu dans le chaos de l'occupation nazie.

Les méthodes employées en Roumanie avant et pen­dant les élections ont été héritées des «chemises noires» de Mussolini et des troupes de choc de Hitler. Les respon­sables des choses perpétrées dernièrement en Roumanie pourraient être appelés devant n'importe quel tribunal et accusés d'assassinat, de l'entière non observation des droits humains.

La violation des pactes

Une fois de plus, des voix se sont élevées pour se mo­quer des excès comme s'il ne s'agissait que d'élections bal­kaniques habituelles. Cette mentalité fait le jeu de la Russie. On entend le cri de «fasciste, réactionnaire» contre ceux qui protestent. Mais les Soviets, par la protection donnée à une telle tactique, demeurent coupables de la violation des pactes de Yalta et de Moscou. Les Soviets emploient en Roumanie la méthode fasciste et la brutalité totali­taire. Les Soviets doivent être accusés maintenant d'appuyer avec un acharnement décidé, des gouvernements fascis­tes dans les Balkans.

Aujourd'hui, ces gouvernements satellites se consi­dèrent tellement sûrs de l'appui des Soviets, que leur sport favori est celui d'attaquer, par exemple, les Etats-Unis en présence des Américains, tandis qu'un représentant russe demeure à côté et sourit d'une manière indulgen­te. C'est ce qui se passa hier soir chez le Premier Ministre Petre Groza.

                                                  

                                                     Bataille verbale

 

Aujourd'hui, un politicien balkanique de quatrième rang, qui jamais n'occupa un poste d'une responsabilité fut-elle quelconque, élu de rien par le «démocrate» An­dré Vischinsky, Groza tint une conférence de presse où il ne fut question que d'attaquer les Etats-Unis et les re­présentants américains, qui, las de sa technique de pro­pagande, le mirent devant une série de ses mensonges évidents.

En parlant des cordons de gangsters qui cernaient la place principale et assommaient tous ceux qui osaient entrer dans l'opposition, Groza déclara que c'est une « fan­taisie des reporters américains». Lorsqu'on lui montra des photos de ces cordons, il se ravisa et déclara que les hommes des cordons étaient chargés simplement de pro­téger les paysans.

Mécontent des correspondants anglais et américains qui lui demandaient son opinion sur la terreur et les fal­sifications qui ont régné pendant les élections, il dit: «Les élections ont été beaucoup plus libres qu'aux Etat-Unis.» Constatation surprenante de la part de quelqu'un qui, dans l'Occident, n'a pas dépassé Vienne. Avec l'appro­bation des Soviétiques et des représentants satellites pré­sents il continua: «Les Etats-Unis désireraient vivement avoir la discipline de la   Roumanie, le jour des élections.»

Grande effronterie

Ces paroles sont telles que les représentants du Minis­tère de la Propagande lui conseillent qu'il soit plus pru­dent. Mais Groza, sans se soucier d'eux, poursuit ses at­taques contre la mission étrangère, c'est-à-dire «améri­caine» qui recevait des signatures de protestation contre les élections.

Il soutient qu'une telle action signifie un appui don­né aux «réactionnaires».

La Roumanie se trouve pourtant, sous le contrôle d'une Commission Alliée. En tant que Président d'une nation vaincue, Groza ne manquait pas d'une grande dose d'impertinence, lorsqu'il faisait ces observations... Le spectacle totalitaire intéressant

II est facile à deviner que sous peu, les journaux de l'opposition seront interdits. Cette méthode est la même pour tous les pays occupés par les Soviets. Le Parti Natio­nal-Paysan qui est le plus puissant parti politique du pays, après les calculs falsifiés du gouvernement, n'aura que 32 sièges au Parlement; ensuite, il va être réduit au silence total. Une série d'arrestations et d'obstacles à l'esprit critique fera de la Roumanie un jouet totalitaire avec le­quel les Soviets s'amuseront comme bon il leur semble­ra.

Sa situation est difficile et il faut beaucoup de diplo­matie pour arriver à un modus vivendi qui ne puisse pas compromettre le prestige occidental dans cette partie de l'Europe.

 

 LE GOUVERNEMENT ETAIT BEL ET BIEN

BATTU A CES ELECTIONS

ET DE LOIN


 

Le 26 novembre 1946, dès que les résultats des élections furent connus, le Gouvernement des Etats-Unis fit une déclaration officielle:

«...Le département d'Etat a actuellement en sa pos­session de longs rapports sur la façon dont se sont dérou­lées ces élections et il en ressort que la falsification des registres électoraux, le procédé même du vote et le dénom­brement des voix, joints à la vague de terreur qui s'abattit sur les éléments démocratiques du pays, ont empêché d'importantes fractions de population d'exprimer libre­ment leur choix».

Le Gouvernement de la Grande-Bretagne envoya aussi une déclaration:

«...Les élections ne furent ni libres, ni régulières... Le développement des opérations électorales se passa d'une façon telle qu'une vaste falsification des résultats était possible. Le gouvernement de Sa Majesté considère donc qu'en raison des circonstances, les résultats des élec­tions en Roumanie ne représentent pas l'opinion réelle du peuple roumain.»

 

* * *

Le 22 novembre 1946, la revue «Une semaine dans le monde» écrit:

...«Conscient de sa faiblesse, le gouvernement Groza s'est efforcé de reculer, tant qu'il a pu, la date des élections; il ne l'a définitivement fixée qu'une fois mise au point la technique permettant de jouer gagnant. Jeudi (21 novembre) les résultats n'étaient pas encore tous con­nus, mais la tendance générale était déjà très nette... La validité de ces élections est un fait très contestable. Des savantes difficultés dans la loi électorale ont empêché deux millions d'électeurs hostiles d'obtenir leur inscrip­tion sur les listes; en revanche les électeurs sûrs ont reçu la possibilité de voter plusieurs fois...»

 

* * *

Dans le Figaro du 17 novembre 1947, dans l'article «Comment l'URSS a absorbé la Roumanie» on trouve: «Les élections ont lieu. ELLES SONT OUTRAGEUSE­MENT FALSIFIEES et leurs résultats obligent les repré­sentants de l'opposition à quitter le gouvernement.»

* * *

Les trois partis d'opposition donnèrent le 28 novembre un communiqué: «...Le gouvernement a «arrangé» des ré­sultats par FRAUDE et TERREUR, en flagrante oppo­sition avec la réalité et avec la volonté du corps électoral... Fidèles aux principes démocratiques ratifiés par les accords de Yalta et Moscou et aux idéaux qu'animent les Nations Unies, ces partis déclarent les élections organisées dans de telles conditions, comme dépourvues de tout fondement de droit et par conséquent, NULLES et NON AVE­NUES.»

* * *

Iuliu Maniu envoya le 1er décembre un mémoire au président de l'Assemblée des Députés:

«...Je vous prie de bien vouloir prendre acte que le Parti  National  Paysan  considère les élections du 19 novembre 1946, comme NULLES et NON AVENUES. Le Parti National-Paysan considère le Parlement cons­titué comme une assemblée de fait, issue de la violence, de la fraude et du faux dans les actes publics, qui n'a pas l'habilitation de légiférer, de représenter et d'engager les intérêts du peuple roumain. Par conséquent, les députés National-Paysans, proclamés élus, ont décidé de s'abste­nir des travaux de ce Parlement.

* * *

 

Dans les déclarations de Iuliu Maniu aux journalistes étrangers, faites le 12 décembre 1946, il précisa:

«J'ai la satisfaction de constater que l'information que je vous ai donnée ,à savoir que le gouvernement com­muniste de Roumanie ne représente pas l'opinion publique roumaine, se voit confirmée au-dessus de tout soupçon. Aux élections du 19 novembre, le Parti Communiste, qui soutient le gouvernement, est resté en minorité, alors que les partis d'opposition sont sortis vainqueurs. Tout spé­cialement le Parti National-Paysan est sorti vainqueur dans la bataille électorale qui a eu lieu et qui a démontré l'impopularité du gouvernement d'aujourd'hui. Malgré l'utilisation de la terreur et du faux, la liste gouverne­mentale n'a pu réunir que 16,5% des voix, alors que le Parti-National-Paysan justifiant nos prévisions réunit plus de 70%.

Selon toutes les règles constitutionnelles et parle­mentaires, le gouvernement doit démissionner immédia­tement après les élections.

La conséquence de ce fait ne peut être autre que la démission du gouvernement actuel et l'organisation im­médiate des élections donnant véritablement un parle­ment représentatif.

La falsification des documents publics accomplie par les personnes officielles du gouvernement est prou­vée. Elle est aussi confirmée par l'empressement avec lequel le gouvernement a amnistié le délit de faux en actes publics par Décret Royal, un jour avant l'ouverture de la session parlementaire.

 

DES ALLIES ONT CONSTATE L'ILLEGALITE DES ELECTIONS

Les NATIONS UNIES ont apporté devant le mon­de entier des résolutions qui nous attachent d'autant plus que nos partis, sur la base de ses résolutions, ont mené de bonne foi une série entière d'actes, en parfait accord avec ses résolutions.

Spécialement le Parti National-Paysan, qui a prouvé entièrement sa force politique, peut demander de ne plus être artificiellement écarté de l'activité de gouverner le pays, surtout lorsque le point de départ des résolutions des NA­TIONS UNIES était justement le principe que le pays doit être gouverné par un gouvernement démocratique et représentatif.

Le peuple roumain souhaite être un facteur respec­té dans l'ensemble des peuples civilisés. Ce respect ne peut pas être acquis par les procédés utilisés par le gouverne­ment actuel de Roumanie. Ce gouvernement promut le vol, le truquage des urnes, la falsification des documents publics, le non respect des obligations internationales acceptées solennellement par lui-même, des agressions con­traires aux accords internationaux, l'abolition du droit d'association et des libertés de l'homme. «LE PEUPLE ROUMAIN ASPIRE ELEVER A LEUR PLEINE VA­LEUR LES CONCEPTIONS ETHIQUES DE LA MO­RALE CHRETIENNE: LE PARTI NATIONAL PAY­SAN CROIT QUE LES SOUFFRANCES DU PEU­PLE ROUMAIN PRENDRONT FIN ET QUE SES ATTENTES SERONT REALISEES QUANT A L'INS­TAURATION    D'UN    ORDRE    DE    DROIT   A   L'INTERIEUR ET L'ASSURANCE D'UNE PAIX DURA­BLE ET JUSTE.»

Les trois leaders de l'opposition ont condamné pu­bliquement cette falsification grossière, ont désavoué le parlement comme résultant d'une fraude et ont mani­festé leur refus de participer aux travaux de la soi-disant Assemblée Nationale.

On vient de vous présenter la «légitimité» du gou­vernement communiste roumain qui a ses racines dans les chars soviétiques et dans le vol de la volonté nationa­le.

Cette chose fut communiquée aux Grands Alliés, qui garantissaient l'instauration d'une paix juste pour tou­te l'humanité.

LE PEUPLE ROUMAIN ET LEURS VRAIS REPRESENTANTS ONT FAIT TOUT CE QUI E-TAIT POSSIBLE POUR SAUVER LA DEMOCRATIE ET LA LIBERTE EN ROUMANIE.

* * *

L'ANGLETERRE ET LES ETATS-UNIS RECON­NAISSENT LE GOUVERNEMENT COMMUNISTE ROUMAIN INSTAURE PAR DES CRIMES ET LE VOL DE LA VOLONTE NATIONALE.

Les engagements internationaux qui promettaient «solennellement» que le traité de paix serait conclu avec un gouvernement issu d'élections libres ne furent pas res­pectés. Avant même les élections, des pourparlers ont été entamés avec un régime totalitaire en vue de signer le traité de paix.

La Roumanie ne retrouva dans le Traité de paix aucune des déclarations par lesquelles V. Molotov, ainsi que les dirigeants des autres Grandes Puissances avaient, à l'occasion des conférences de Yalta, de Potsdam et de Moscou, expressément garanti sa souveraineté et son in­dépendance. Aucune mesure d'ordre international n'a été envisagée pour assurer la liberté des élections, en reconnais­sant pour fondement implicite du régime la volonté libre­ment exprimée du peuple.

 


Les garanties concernant la jouissance des droits de l'homme et les libertés individuelles ne sont pleinement effectives tant que les libertés politiques proprement dites ne sont pas préalablement restaurées.

APRES LES ELECTIONS

LE PEUPLE ROUMAIN FUT SOUMIS

A UNE VAGUE DE TERREUR DECHAINEE

POUR LA DESINTEGRATION DE LA NATION

ET DE LA SOCIETE

En Roumanie, pays de souche latine et de culture occidentale, les communistes ont été obligés de perpétuer leur camouflage sous une formule de coalition gouverne­mentale qu'ils ont récemment imposé à un électorat re­latif, par toutes sortes de procédés, allant jusqu'à la triche­rie et à la violence.

En somme, dans ces pays balkaniques sous occupa­tion soviétique le but est le même: ASSURER LA DO­MINATION COMMUNISTE ET PAR CE MOYEN MAINTENIR LA PREPONDERANCE DE L'URSS EN EUROPE ORIENTALE.

Deux mois après, la même chose se passa en Polo­gne le 19 janvier à cause des élections, où le gouvernement pro-communiste avait employé tous les moyens légaux et illégaux pour obtenir la victoire. M. Stanislav Mikolajczyk avait par avance annoncé qu'il demanderait l'annula­tion de la consultation dont son parti a été la principale victime.

Une note de l'hebdomadaire «Une semaine dans le monde» dit: «Comment ont réagi les anglo-saxons? Aux yeux de la Grande-Bretagne et des Etats-Unis, les élec­tions n'ont pas été «free and unfettered»: les accords de Yalta et Potsdam n'ont pas été respectés. Malgré leurs multiples avertissements prodigués jusqu'à la veille du 19 janvier  on  n'envisage  la rupture des relations  diplomatiques ni à Londres, ni à Washington, ni un recours éventuel à l'ONU.

EN DEFINITIF, LES ANGLO-SAXONS DE­VRONT S'INCLINER DEVANT LE FAIT ACCOM­PLI, COMME ILS L'ONT FAIT APRES LES ELEC­TIONS BULGARES ET ROUMAINES.»

Le printemps de 1947 fut très dur.

Sur les notes américaines qui parlent de violation et ingérence soviétique en Hongrie, le général Sviridov, président soviétique de la Commission Alliée de Contrôle, répondit: pure invention et intervention grossière et inad­missible dans les affaires hongroises.

LES NOTES ANGLO - SAXONES SONT REJE-TEES COMME EN ROUMANIE, BULGARIE ET POLOGNE. Et M. Sulyok chef du parti d'opposition cria et dénonça la terreur: «Nous sommes devenus un Etat policier, où l'influence de la police, non seulement pèse de plus en plus sur la vie publique, mais encore se fait sen­tir  d'intolérable   façon  dans  la vie privée de l'individu».

A la fin du mois de novembre 1946, quelques jours après les élections, Bennett, l'attaché de presse britannique, a demandé une audience à la Direction du Parti Natio­nal-Paysan, pour s'entretenir à propos de la falsification des résultats des élections et des moyens employés, car le journaliste Geddy du «Daily Herald» voulait des infor­mations précises.

La rencontre des deux anglais, accompagnés d'un interprète, avec Ion Mihalache et Nicolae Penesco a eu lieu dans une maison près du Jardin Ioanid. Ici, le Vice-Président du Parti, Ion Mihalache, montra à ses interlo­cuteurs un énorme tableau des résultats classifîés par dépar­tements, qui dévoilait la situation réelle des élections, la victoire écrasante de l'opposition devant le gouvernement communiste, avec 80% des voix.

Devant l'étonnement des anglais, MM. Ion Mihalache et N. Penesco ont apporté d'autres preuves: des procès-verbaux  obtenus par des gens de confiance là où ils ont

pu avoir accès à des procès verbaux des mêmes circons­criptions signés uniquement par leur Président et dans lequel les résultats étaient tout simplement inversés.

Les faux étaient évidents.

Après avoir appris les méthodes utilisées par les com­munistes, rendues publiques dans une conférence de presse du Parti National-Paysan, le journaliste Geddy dit: «Je suis édifié sur ce qui s'est passé! »

C'est alors que Ion Mihalache intervint:

«Dans cette situation claire, quand vous voyez que la volonté d'un peuple a été volée malgré toutes les ga­ranties données par les Grandes Puissances, parmi lesquelles l'Angleterre, je voudrais que vous nous disiez la manière dont vous pouvez nous aider pour sauver la liberté et le principe démocratique de l'exercice des droits du cito­yen?! »

C'est l'attaché de presse Bennett qui répondit: «Nous ne voulons pas et nous ne pouvons pas faire la guerre pour vous.»

Pendant un moment ils furent tous plongés dans leurs ¦ pensées devant cette affirmation inattendue et ce fut Ion Mihalache qui rompit le silence embarrassant: «Nous, nous avons accompli notre devoir. Le peuple roumain a montré sa volonté, on a même payé avec la vie le courage d'avoir exercé le droit de. citoyen libre, un droit restreint et sacrifié sur l'autel de la démocratie. Mais vous, il faut que vous sachiez apprendre, de notre douloureuse expé­rience, que nos ennemis d'aujourd'hui seront les vôtres demain.»

Cet épisode a été relaté par la personne qui était présente quand Ion Mihalache a exposé à Iuliu Maniu la discussion avec les anglais.

 

LA POLOGNE

En Pologne, on trouvera Rokosovski, Boleslas Bierut, Berman, Zawadki, qui vont terroriser de la même ma­nière ce peuple déjà tant éprouvé au cours de son histoi­re.

STANISLAS MIKOLAJCZYK

«Le viol de la Pologne»

En même temps, les mêmes choses

Au cours de la persécution intolérable qui suivit, nous eûmes affaire non seulement au N.K.V.D., à la Po­lice de Sécurité, à la Milice du peuple et à l'O.R.M.O. —bandes armées communistes—, mais encore à l'Armée polonaise elle-même.

Celle-ci reçut ordre de son chef d'état-major. L'ordre (XXXII) donné à ces unités fut également signé par le colonel Zarzycki Neugebauer, communiste polonais qui avait subi un entraînement intensif en Russie (il signa en qualité de membre du Bureau d'éducation politique de l'ar­mée). Cet ordre fut promulgué le jour même que Bierut annonça la date des élections «libres de toute contrainte» si longtemps attendues par la Pologne. Des Polonais loyaux qui déploraient cette prostitution de nos forces armées, m'en firent promptement parvenir une copie. Dans ces instructions, il était ordonné aux soldats de porter la foi communiste dans les hameaux les plus écartés. Les fermiers paieraient l'entretien des groupes de défense et de propagande. L'armée devait soigneusement reconnaître le person­nel et les sympathisants du Parti Paysan dans les districts ruraux et préparer des listes pour le jour du règlement des comptes.

Les ordres donnés verbalement aux chefs désignés pour ces groupes militaires furent encore plus durs que les ordres écrits. On leur déclara, au cours d'une réunion qui dura six heures et demi :

«Vous êtes autorisés à arrêter et à exécuter les mem­bres du Parti Paysan. Vous vous emparerez de leurs cartes du parti et pourrez saisir leurs autres papiers personnels. Vous répéterez sans cesse que Mikolajczyk est pour les Allemands et que c'est un traître. Les gens seront contraints de promettre de voter pour la coalition gouvernemen­tale au cours des rassemblements de masses.

Les ordres écrits mentionnaient un magazine intitulé La parole du soldat. Imprimé aux frais du gouvernement dans une imprimerie religieuse d'avant guerre, un gouver­nement dressé contre l'immense majorité de la nation, et particulièrement contre le Parti Paysan qui représente manifestement cette majorité nationale. Tout l'appareil de la Police de Sécurité est en œuvre. Elle organise la des­truction méthodique du Parti Paysan. Au cours de la lut­te, notre parti a non seulement à faire tête à l'administra­tion policière, mais encore à l'armée. Et je citais les pa­roles d'un propagandiste militaire: «II n'y a pas de consti­tution en Pologne. Aujourd'hui, c'est nous qui sommes les maîtres et nous détruirons tous ceux qui se dresseront contre nous.» «Rien ne montre mieux, dis-je, les condi­tions générales de la situation politique dans notre pays... Le Premier Ministre Osobka-Morawski a ouvertement déclaré à plusieurs reprises: «Le gouvernement ne peut pas perdre les élections, il ne le permettra pas.»

Je fournis aux ambassadeurs des nouveaux exemples de crimes commis au cours de la seconde moitié de dé­cembre et de la première partie de janvier. Je les informai que 149 candidats du Parti Paysan étaient pour le moment en prison et que 1692 dirigeants du parti étaient incarcé­rés, tandis que le total des adhérents jetés dans les geôles dépassait déjà 100 000.»